Comment gérer les risques a l'horizon 2030 et au-delà (Pr Jean-Paul Louisot)

« Le progrès, but sans cesse déplacé, étape toujours renouvelée, a des changements d'horizon. L'idéal, point. » (Victor Hugo dans William Shakespeare)

La gestion traditionnelle des risques a grandi à l'ère industrielle. Au 17ème siècle, l'interprétation mécaniste du monde développée par Isaac Newton a permis d'utiliser les approches de la probabilité résultant des travaux de Pascal et Ferma pour établir des prédictions fiables avec un degré de précision jamais vu auparavant. Avec l'apport de Bernoulli sur les statistiques ou probabilités expérimentales, ces théories ont contribué à alimenter la révolution industrielle et, avec elle, la structure acceptée des organismes.

Les entreprises étaient alors considérées comme des machines qui pouvaient être modifiées et huilées pour fonctionner plus rapidement et produire plus.

Comme les tâches répétitives des salariés devenaient de plus en plus spécialisées, les services internes comprenaient moins ce que les autres faisaient. Ce sont les premiers exemples de structures organisationnelles cloisonnées qui entravent encore aujourd'hui la circulation de l'information au sein des organismes, en particulier celle concernant les risques.

Aujourd'hui, les organismes et les contextes au sein desquels ils évoluent ont changé de façon dramatique depuis l'ère mécaniste, et, en particulier depuis l'avènement de l'ère de l'information : le monde est maintenant considéré comme l'imbrication d'une multitude de systèmes complexes. Les événements actuels et récents, y compris le Brexit, la COVID-19, la guerre en Ukraine et la récession qui se dessine, ont servi à mettre en exergue cette situation. Les organismes modernes étant aujourd'hui l'incarnation de systèmes complexes, avec des tendances lourdes vers toujours plus de complexité et de vélocité dans le changement, l'approche de gestion des risques doit être adaptée en conséquence. Pour emprunter une pensée à Newton, pour voir plus loin, à l'horizon 2030 et au-delà, il va falloir apprendre aussi à se tenir sur les épaules des géants et passer à la prochaine étape de l'évolution du Monde.

Le monde hyper-connecté d'aujourd'hui exige une nouvelle approche fondée sur la théorie de la complexité puisque la complexité est donc au cœur des bouleversements en cours. Comme on peut s'y attendre dans un domaine universitaire en rapide évolution, il n'existe pas de définition acceptée du terme complexité.

Mais il dérive du mot latin « complexus » : quelque chose composé de plusieurs parties. Donc, la complexité décrit une situation dans laquelle il y a de nombreuses composantes contribuant avec de multiples relations d'interfaçage – mais c'est aussi une situation qui est dynamique, donc ses composantes et ses relations évoluent et changent continuellement.

Les gestionnaires de risques sont idéalement placés pour aider les organismes à identifier la complexité et à exploiter son pouvoir par l'innovation et la création de valeur en identifiant et évaluant son impact sur le paysage de risques de chaque organisme ; encore faut-il que les praticiens de tous les secteurs apprennent à collaborer pour mieux comprendre les grandes tendances d'évolution pour le futur à moyen et long terme en fixant une ligne d'horizon vers le milieu de ce siècle pour discerner les lignes de fractures, menaces et opportunités.

« Le progrès était dans l'horizon des existences. Il signifiait le bien-être, la santé des enfants, le savoir, tout ce qui tournait le dos aux choses noires de la campagne et à la guerre.. » (Annie Ernaux, prix Noble de Littérature 2022 dans son roman les années publié en 2008)
Comment interagissent la théorie des systèmes et la théorie de la complexité ?
« La vie est vraiment simple, mais nous insistons pour la rendre compliquée. » (Confucius, penseur et philosophe chinois)

La théorie des systèmes croise la théorie de la complexité parce qu'elle cherche à reconnaître, comprendre et contrôler le fonctionnement des relations entre les composants d'un système complexe.

Les deux théories se penchent essentiellement sur la façon de contrôler les résultats pour des phénomènes comme …

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