Suivre et mesurer les efforts du risk management (Pr Jean-Paul Louisot) Article lu 26966 fois, depuis sa publication le 22/09/2023 à 07:16:19 (longueur : 5835 caractères)
« Si vous ne recueillez pas de données, vous volez à l'aveugle. Si vous recueillez et vous concentrez sur un trop grand nombre de données, elles peuvent obstruer votre champ de vision. » (Scott M. Graffius)
Depuis sa naissance au milieu du siècle dernier, la gestion des risques a souffert d'une difficulté essentielle, à savoir la définition d'indices de performance pertinents. Tant que son périmètre s'est limité aux risques assurables la tentation a été de considérer le budget assurances comme pourcentage des charges ou des recettes de l'organisme. Bien entendu, la difficulté était de démontrer la pertinence des efforts de réduction des risques et de prendre en compte le cycle alors régulier des tarifs d'assurance sans oublier qu'il aurait fallu également intégrer la qualité des couvertures souscrites.
Lorsqu'il a développé les supports pour la première qualification professionnelle en gestion des risques il y a environ un demi-siècle, George Head a été confronté à une problématique spécifique à savoir que l'horizon pertinent de la gestion des risques qui devrait se mesurer en décennies, voire en siècle pour les risques lourds, loin de l'année, voire du trimestre référence habituelle dans la vie des entreprises. Il a essayé d'adapter l'approche de l'actualisation des flux de trésorerie mais a achoppé sur la volatilité des flux et le choix de la mesure du risque alors que le modèle de diversification proposé par Harry Max Markowitz en 1952 a utilisé la dispersion, la variance, comme mesure.
Pour surmonter la difficulté. George Head a proposé de définir deux batteries d'indices, de résultat pour ceux qui sont mesurables dans l'année, d'activité pour mesurer les efforts développer pour le traitement des risques. Clairement, les premiers s'adressent aux risques dits de fréquence dont les effets se transforment en coûts, comme les flottes automobiles, les frais médicaux d'une population importante ; les seconds s'appliquent aux risques graves alors que les effets ne seraient mesurables que sur le « temps long ».
Plus tard, en particulier avec l'émergence de la gestion des crises et des problématiques de continuité ou de redémarrage, les experts ont adopté le concept de résilience, issue de la mécanique et après un transit par les sciences psychosociologiques.
Pour autant, aucune mesure fiable de la résilience n'a été proposée à ce jour. Or la question de la performance est au cœur de la gestion d'entreprise, ainsi que celle du retour à un fonctionnement efficient après une perturbation majeure ce qu'un consultant évoque en interpellant les dirigeants : « En tant que dirigeant, vous serez confronté au choix de faire le pivot (si vous le pouvez) ou de persévérer (si vous n'avez pas d'autre choix). Cela mènera à une série de « paris ». Vous avancez l'hypothèse que les choses que vous changerez vous permettront de fonctionner à des niveaux antérieurs à l'événement. Mais, combien de temps vous faudra-t-il pour valider votre hypothèse et avoir un pari payant avec les niveaux pré-événement ? Si vous manquez de temps pour le comprendre ou à court de paris que vous pouvez placer, alors vous perdez votre position sur le marché ou le pire risque de faire faillite. »
Le risque est au cœur de la finance et de l'investissement modernes. Dans ce monde, le risque vient de ne pas savoir ce que l'avenir réserve pour la performance des instruments financiers, et donc beaucoup d'efforts ont été consacrés à l'élaboration de méthodes pour le quantifier. Quand un large éventail de résultats est possible, la probabilité de perte augmente, ce qui peut justifier le choix d'exprimer le risque en termes de volatilité, comme l'écart-type, ou la probabilité d'un résultat négatif fondé sur des modèles fondés sur des mesures de la valeur en risque (VaR).
L'incertitude est très importante dans les modèles de prix. Les investisseurs n'investiront que dans des obligations dont le prix est fixé de manière à compenser les investisseurs pour la possibilité de défaut de paiement de l'obligation, et la formule de Black-Scholes pour les options de prix utilise l'écart-type pour tenir compte de la volatilité du marché. Les décisions du portefeuille de placements sont largement fondées sur l'équilibre entre le rendement et le risque, et plus particulièrement sur les mesures de la volatilité.
Le rôle essentiel du risque en finance en particulier, mais aussi plus généralement en gestion d'entreprise, est indéniable ; cependant, la façon de quantifier et de représenter ce risque a fait l'objet de beaucoup de recherches et de débats parce que les conséquences de ne pas représenter avec précision le niveau de risque dans un scénario particulier peuvent être désastreuses. Les rendements sont le plus souvent représentés par des distributions gaussiennes et discutés en termes de moyennes et d'écarts-types.
De nombreux chercheurs ont contesté cette pratique, comme Mandelbrot, qui a écrit que les modèles fondés sur de telles distributions déformaient la probabilité d'événements dans les « queues épaisses » qui représentent les résultats les plus importants. Ceci ouvre bien entendu le débat sur les cygnes noirs, voire les cygnes gris.
Pour comprendre et utiliser les concepts de risque et d'incertitude, il faut être en mesure de mesurer les résultats de ces concepts. La recherche psychologique et économique montre que les émotions telles que la peur, l'évitement de l'ambiguïté et les ressentis de perte émotionnelle représentent des risques effectifs. Ces sentiments sont donc pertinents pour la prise de décision dans l'incertitude.
Toutefois, …
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