La progression du risque d'inondation qui pèse sur les Alpes-Maritimes
Article lu 20436 fois, depuis sa publication le 16/10/2015 à 07:51:51 (longueur : 4358 caractères)
Les inondations auxquelles est exposé notre pays peuvent venir de la mer ou du ciel et cette fois-ci, c'est le ciel qui est en cause.
Le tout est de savoir s'il s'agit de phénomènes classiques et dans ce cas, nous savons que la France bénéficie d'un climat clément qui fait que ces phénomènes ne sont pas notre quotidien et ne se reproduisent que de temps à autre, où s'ils sont imputables au réchauffement climatique, encore contesté par certains, mais qui, pour nous, est depuis longtemps évident.
Dès le dimanche 4 octobre et tout le début de la semaine, les grandes chaînes de télévision ont donné la mesure du désastre et le président François Hollande, qui s'est rendu sur place a donné, face au sinistre qui a coûté la vie à une vingtaine de personnes, la consigne formelle à la population, pour l'avenir, en cas d'annonce d'un cataclysme, de rester à la maison, d'attendre les secours et de ne jamais descendre dans le parking, pour voir ce qu'il est advenu de sa voiture.
Une fois de plus, une majorité de victimes a péri dans des parkings souterrains, où elles ne devaient pas se rendre.
Météo France avait annoncé les orages en lançant une alerte orange, qui aurait justifié, une fois déclenché, en raison de sa persistance et son intensité, le niveau rouge, mais la population, qui la subissait, devait en être consciente.
Une fois l'orage passé et le soleil revenu, il restait à pomper l'eau, à nettoyer la boue et à faire l'inventaire des dégâts, justiciables d'une prise en charge au titre de la garantie des catastrophes naturelles.
Le président de la République a annoncé qu'il ferait publier, dès le Conseil des ministres du 7 octobre l'arrêté de constatation de catastrophe naturelle, déclenchant l'intervention des assureurs par le régime spécial des CatNat.
Il appartient aux communes de signaler à la préfecture l'étendue des zones touchées, pour les faire figurer dans l'arrêté, sans perdre de temps.
Les victimes seront indemnisées sur la base de leurs contrats d'assurance standard, ce qui suppose, pour les voitures emportées par les flots, au moins une assurance vol ou incendie.
Les entreprises seront indemnisées en fonction de l'étendue de leurs garanties ordinaires, notamment pour l'interruption d'activité.
Une fois l'indemnisation amorcée et les assurances revues par chacun, le cas échéant, en fonction des insuffisances de garantie constatées, le régime d'assurance des Catastrophes naturelles veut que l'on revoie aussi le plan de prévention des risques, généralement le point faible du régime, pour en éviter, dans la mesure du possible, leur renouvellement.
Cette révision revêt un caractère d'urgence, s'il s'avère, comme nous le craignons, que nous sommes en présence d'un dérèglement climatique, qui ne peut que s'accélérer.
Les orages qui ont déferlé sur les Alpes Maritimes n'ont rien d'inhabituel en soi, tout en ayant étonné par leur violence, par leur intensité et leur durée.
On appelle cela un phénomène méditerranéen, que l'on explique par l'air froid venu d'altitude et qui entre en conflit avec de l'air doux et humide, réchauffé par une mer encore chaude.
Les orages de cette nature sont généralement des phénomènes de petite nature, ce qui n'a pas été le cas cette fois-ci.
De plus, une fois déclenché, l'orage est resté coincé sans bouger pendant deux heures, d'où ces trombes d'eau.
Quant à savoir si ces phénomènes s'accentueront avec le réchauffement climatique, les modèles de Météo France sont encore trop limités pour l'affirmer, mais la variabilité des pluies pourrait augmenter, pour Serge Planton, un climatologue de Météo France.
Cependant, dans le sinistre qui vient de se produire, ce n'est pas le ciel qui est en cause mais l'homme.
Dans le temps, terres et cours d'eau savaient éponger les excès d'eau tombés du ciel et dans le cadastre napoléonien, les rives de la Siagne, un petit fleuve côtier, étaient autrefois plantées d'oseraies, de prairies et de peuplier, alors qu'elles sont aujourd'hui bétonnées.
La Saigne est sortie de son lit, mais ce n'est pas la première fois, ce qui a aggravé la situation, c'est que l'urbanisation ne laisse plus aucun sol non artificiel et que plus rien ne retient l'eau, qui ruisselle vers l'aval, une fois que les égouts débordent.
Erik Kauf
Rédacteur en Chef