L'addiction au tabac n'est pas une fatalité
Article lu 23203 fois, depuis sa publication le 09/10/2015 à 07:45:21 (longueur : 4221 caractères)
L'exemple nous vient des Etats-Unis où le nombre de fumeurs est, depuis des décennies, tombé au plus bas.
Aujourd'hui, seuls 15 % des adultes fument encore aux Etats-Unis, contre 42 % en 1965 et 24,7 % en 1997, des chiffres officiels fournis par le Centre national des statistiques de santé du pays, le NCHS.
Cette baisse du nombre de fumeurs montre qu'il est possible de rompre l'addiction au tabac à condition de trouver le bon moyen de persuasion.
Malgré cette décrue, le tabagisme reste la première cause de décès aux Etats-Unis, provoquant la mort de quelque quatre cent quatre-vingt mille personnes chaque année, selon les autorités sanitaires américaines.
Notons qu'aux Etats-Unis, les procédures judiciaires se multiplient contre les cigarettiers, sous la forme d'actions collectives et individuelles sans qu'ils renoncent pour autant à leur activité, qui reste profitable, mais ils vivent aussi des exportations.
Ainsi, en début d'année, les trois plus grands cigarettiers américains ont accepté de payer 100 millions de dollars pour clore des poursuites intentées par des fumeurs ou par leurs familles, des fumeurs qui sont soit tombés malade, soit morts à cause du tabac.
Les médias ont signalé qu'un tribunal de Floride a accordé en première instance, une indemnité de 23,6 millions de dollars à la veuve d'un fumeur, mort d'un cancer du poumon, une condamnation inconcevable en droit français.
C'est le bruit fait autour de ces affaires qui rend palpable aux Etats-Unis le risque pris par les fumeurs, bien plus que les illustrations macabres sur les paquets de cigarettes, qui ne font pas reculer le nombre de fumeurs, tout en donnant des idées aux collectionneurs.
En France, on est toujours à la recherche de la formule choc qui fera reculer le tabagisme qui coûte chaque année 120 milliards d'euros à la société, autant que l'alcool.
Ce montant prend en compte le coût des vies perdues, des pertes de productions ou de la qualité de vie, mais aussi le montant des dépenses publiques, de soin, de prévention et de répression.
Ces chiffres prennent aussi en compte les recettes sous forme de taxes sur le tabac et, comble du cynisme, les économies réalisées par les régimes de retraite, du fait des pensions non versées aux 78 966 morts par an liés au tabac, à en croire les chiffres du professeur Pierre Kopp de l'Université Paris 1, Panthéon Sorbonne.
Selon les chiffres de Pierre Kopp, la France compte en moyenne 672 000 malades du tabac et on peut dire que la France paye cher leur addiction au tabac.
La France compte 13,4 millions de fumeurs quotidiens dont les 3/4 sont des clients réguliers des buralistes, qui disposent du monopole de la distribution du tabac, en vendant en France les cigarettes et à d'autres produits du tabac, légalement importés, alors que la France n'en produit plus, depuis longtemps.
A en croire des statistiques non officielles, 25 % des cigarettes fumées en France échappent à leur monopole, en provenant d'achats frontaliers plus tolérés qu'autorisés et de trafics clandestins, d'autant plus dangereux pour la santé des fumeurs, lorsqu'ils portent sur des produits d'origine inconnue et de composition douteuse.
Les buralistes, qui cumulent généralement leur activité avec celle de « bistrotiers », passent leur vie à entraver la lutte contre le tabagisme du gouvernement, en exerçant leur lobbying sur des parlementaires, en jouant sur leur influence sur les électeurs, qui fréquentent régulièrement leurs établissements.
Ils s'opposent actuellement à la mise en pratique, dans quelques mois du paquet neutre, tout en bénéficiant des largesses du gouvernement, qui redoute leur action.
On ignore si le paquet neutre, s'il voit le jour, aura des effets sur le comportement des fumeurs, par contre, la solution qui consiste à relever le prix des cigarettes à un effet instantané sur les achats chez les buralistes, mais entraîne une hausse des achats clandestins.
Il nous reste à percer les secrets des Américains pour réduire le nombre de fumeurs, bien que celui-ci y reste toujours trop élevé.
Il faudrait arriver, partout dans le monde, à zéro fumeurs.
Erik Kauf
Rédacteur en Chef